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Fév
Des erreurs qui coûtent très cher dans le football de haut niveau…
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Dans les colonnes de France Football, Unai Emery est revenu sur la plus grosse désillusion de sa carrière : la fameuse remontada du Barça en mars 2017.
L’entraîneur espagnol confie dans cette interview que, 3 ans après, il n’a toujours pas digéré cette soirée cauchemardesque.
Il met en avant deux principales raisons qui sont les suivantes :
La première raison : l’arbitrage
« En 8ème de finale contre Barcelone, nous faisons un match aller de très haut niveau (4-0 au Par des Princes, ndlr). Et au retour, on se fait éliminer car le VAR n’existait pas encore (6-1 au Camp Nou). On a clairement été éliminés par des décisions d’arbitrage. »
La deuxième raison : Thiago Silva
« Je voulais que l’équipe défende plus haut. Thiago Silva est un super joueur, mais je voulais qu’il soit plus haut et je n’ai pas réussi à lui faire accepter cela. Je voulais qu’il sorte de sa zone de confort, qu’il ose défendre plus haut pour que la pression générale de l’équipe sur l’adversaire soit plus efficace. J’ai travaillé avec lui pour lui faire accepter cela mais je n’ai pas réussi… Cette caractéristique du jeu de Thiago Silva rejaillissait sur toute l’équipe qui, sous la pression, avait une tendance naturelle à reculer. Pourtant, je donnais la consigne de remonter. Mais ça n’a pas été entendu… »
Les deux raisons invoquées sont intéressantes à analyser…
À l’époque des « faits », j’avais déjà réalisé deux articles au sujet de la préparation catastrophique du PSG sur le plan mental avec notamment la vidéo d’un repas suréaliste entre 4 joueurs cadre du club : « SI SE PUEDE » : Auto-persuasions, prophéties auto-réalisatrices, ce qui a pesé avant le match Barça-PSG

La raison de la défaite expliquée par la « non existence » de la VAR n’est, selon moi, pas recevable.
Elle se situe dans le registre des « commentateurs » (journalistes, fans, spectateurs) qui vont donner un avis toujours subjectif sur l’existence d’erreurs ou non…
Ce n’est pas la voie que devrait prendre un professionnel.
Un professionnel doit toujours s’interroger sur les choses qui sont sous son contrôle.
L’arbitrage n’en fait pas partie…
En revanche, la deuxième explication est beaucoup plus intéressante.
Elle fait référence à une dimension essentielle dans le sport de haut niveau.
La dimension de la communication.
Comment s’assurer que mon message soit non seulement bien entendu mais, en plus, mis en application.
Cet enjeu est majeur.
Pourtant, dans le sport de haut niveau et le football en particulier, cette question reste très souvent dans le registre du « feeling ». Or, les sciences sociales nous montrent qu’il existe des profils de personnalité très différents et que les messages doivent être adaptés en connaissance de cause.
> LE CONTENU (les mots choisis),
> LE TON EMPLOYÉ (amical, directif),
> LE MOMENT (juste avant un match, à l’entraînement) et
> LE CONTEXTE (en tête à tête ou en groupe),
…vont avoir des impacts TRÈS DIFFÉRENTS selon les personnes.
Ne pas travailler sur ce point, c’est se condamner à dépendre de facteurs extérieurs (arbitrage, faits de jeu) ou espérer que les planètes soient alignées le jour J. Le « feeling » a ses limites…

L’autre point important qui ne semble pas avoir été traité est le traumatisme – je pèse mes mots – vécu par Thiago Silva lors de la coupe du monde 2014. Pour rappel, il a vécu cette compétition dans un état émotionnel extrême : il n’a pas voulu tirer le pénalty lors de la séance décisive lors des quarts de finale et il a vécu la terrible déroute à domicile contre l’Allemagne 7 à 1…
Durant cette Coupe du Monde il a beaucoup pleuré et montré des failles psychologiques qui bien entendu ne sont pas « honteuses » mais qui méritaient d’être traitées…
Quand un joueur vit un tel traumatisme, il ne faut pas s’étonner que dans des situations de stress extrême il « se mette sur la défensive » et commence « à reculer ». Ce n’est même pas un réflexe « psychologique », il s’agit d’une réaction physiologique. Face à un danger perçu comme mortel par le cerveau archaïque, une des solutions qu’il envisage, c’est… la fuite.
Vous avez beau lui donner les consignes tactiques les plus pertinentes du monde (raisons rationnelles), le cerveau du joueur va se préoccuper en premier lieu de ce qu’il estime (à tort) être une question de vie ou de mort pour lui !

Dans le cas de Thiago Silva, ce qui est d’autant plus dommageable c’est qu’il est capitaine de l’équipe ! Son ressenti et son attitude vont être très contagieux dans les moments de stress extrême avec les conséquences que l’on connait…
Et tant que le traumatisme ne sera pas traité, il ne faudra pas s’étonner qu’il rejaillisse saison après saison (rappelez vous du match perdu du PSG après avoir battu Manchester 0-2 à l’extérieur…).
Les conséquences de l’absence de travail sur ces questions profondes sont toujours très couteuses pour les joueurs, les coachs, les équipes et bien entendu les clubs.
Ce qui fait aujourd’hui dire à Emery :
« À Paris, je pouvais devenir le meilleur entraîneur du monde. J’ai raté cette occasion… »